You're nicked, chum: you're under arrest

© lestrady

Robin Pilkvist

Âge, date et lieu de naissance ; 23 ans, née le 19 mai 1988 à Ålesund. Nationalité ; norvégo-suédoise Statut sentimental ; qu’est-ce que c’est que ça ? Statut professionnel ; guide touristique en été et secrétaire administrative au commissariat le reste de l’année. Team ; neutral


Qualités & Défauts : débrouillarde, placide, spontanée, expansive, condescendante, individualiste, défaitiste (réaliste, répliquera-t-elle), rancunière, négligente, charmante (cherchez l’intrus).


What you might (not) wanna know :
- À l’école, Robin était reconnue comme la miss-je-sais-tout locale, levant la main toutes les cinq secondes et plaçant des réflexions à tout va sans réellement se soucier de leur pertinence ou des soupirs exaspérés de ses camarades (voire ceux du prof, plus discrets). Elle était toujours partante pour lire, donnait les réponses aux plus nuls pour avancer plus vite et ne faisait jamais ses devoirs, considérant que ça ne lui servait à rien puisqu’elle était déjà première de la classe.
- Elle n’a jamais eu l’intention de passer son permis de conduire et a beaucoup de mal à ne pas s’agripper à son siège quand elle monte dans une voiture. Pour remédier à ce léger souci de déplacement, elle prend son vélo et grille toutes les priorités (oui, je vous l’ai dit, elle n’a pas son permis).
- Elle est fille unique et ça se voit (chacun chez soi et les moutons seront bien gardés, autrement dit, démerdez-vous). Cependant, n’appartenir à aucun clan « fixe » l’a forcée à accepter un rôle de médiatrice qu’elle endosse désormais machinalement. C’est une pacifiste, au fond, et les Texans ont beau être ridicules, ils sont plutôt drôles.
- Bien manger est quelque chose d’assez accessoire à ses yeux : elle ne passera jamais plus de cinq minutes dans une cuisine (le temps de foutre un plat tout préparé au micro-ondes) ni plus d’une demi-heure au restaurant (quand elle daigne y aller). Bouffer est une perte de temps, tout comme ingurgiter les plats dans un ordre bien précis, du salé au sucré. Si elle veut des cacahuètes à 6h du matin, elle mangera des cacahuètes à 6h du matin.
- Oui, Robin est bornée. Oui, elle aime la musique, les rocking-chairs, la mauvaise foi, Gary Clark Jr, Severus Snape, les aurores boréales et les lapins. Non, Robin n’a pas envie d’arrêter de fumer. Non, elle n’aime ni les anniversaires, ni les pots de départ, ni les mariages, les chapeaux, l’Angleterre, la guimauve, la pudeur ou les hamburgers.

Spoiler:

Once upon a time
I'm not here to save you, I'm the main character of my life!



« Donc tu m’abandonnes ici avec maman, Marta et une bande de Texans dégénérés pour… faire le tour du monde avec une fille que tu as rencontré il y a six heures. Aron… » Soupir dramatique. « Tu réalises qu’on n’est pas dans un film américain, n’est-ce pas ? Et que tes chances de trouver un happy ending au milieu de l’Atlantique sont très, très limitées ? » La voix à l’autre bout du fil était malmenée par les grésillements, confirmant à Robin ce dont elle se doutait déjà : il avait quitté Geiranger depuis belle lurette. « Génial. C’est super. Mmm hmm. Waw. Vraiment ? » Le téléphone coincé contre son épaule, elle tartinait une biscotte tout en feignant l’enthousiasme, admirant une fois de plus cette capacité extraordinaire qu’avait Aron à s’immuniser contre le sarcasme à chaque fois qu’il tombait amoureux. Elle avait essayé à peu près toutes les réactions possibles et imaginables (l’exaspération, la logique, la colère, l’inquiétude, l’approbation, la crise de nerfs, l’indifférence…) avant d’abandonner et de faire semblant de le soutenir, pariant mentalement sur la durée de vie de sa nouvelle idylle. Et elles ne duraient jamais bien longtemps, Aron ayant le chic de dégoter ce genre de filles parfaites, vues de loin, mais qui se révélaient insupportables au bout de deux semaines. Il revenait toujours penaud, le cœur en miettes, sa valise remplie de photos et de souvenirs d’une destination fabuleuse qu’il s’empressait d’oublier au grenier avant de s’oublier, lui, au fond d’un verre, de remonter doucement la pente puis de tomber à nouveau amoureux. Le grenier regorgeait donc à moitié des affaires d’Aron, ce qui était plutôt curieux, si l’on y réfléchissait deux minutes, parce qu’Aron ne faisait même pas partie de la famille.

« Mmm hmm. C’est ça, fabuleux. On fait comme d’habitude, on se rejoint au Wes’ dans deux semaines quand tu te seras fait larguer…? … Voilà. Moi aussi je t’embrasse, abruti. » « Aron, je suppose ? » Marta était entrée à pas de loups dans la cuisine et avait réchauffé son café tout en écoutant les bouts de conversation à sa portée. Marta qui, elle non plus, n’avait aucun lien familial au sens strict avec qui que ce soit dans cette maison. Vous n’y comprenez rien ? Patience, les explications se trouvent plus loin. « Il est parti pour la Sibérie, si j’ai bien suivi. Parce que les parents de la fille qu’il a rencontrée vivent là-bas… ou un oncle à qui elle doit laisser son chien… quelque chose du genre. Pas bien écouté. » Marta hocha la tête, l’air de ne rien y comprendre du tout. « Je vois. » Cela faisait longtemps qu’elle avait arrêté de vouloir déchiffrer le comportement d’Aron, le trouvant bien trop incohérent à son goût. Marta n’aimait pas abandonner mais elle préférait les choses carrées, les règles, les traditions, la routine. Elle n’aimait pas l’invasion texane, bien sûr, et demandait sans cesse à Robin si elle ne pouvait pas les faire arrêter pour tapage nocturne, ou port d’arme illégal, ce à quoi il fallait toujours répondre : « Marta, pour la énième fois, je-ne-suis-pas-flic. Je m’occupe juste de la paperasse, c’est nettement moins amusant. » Elle commençait à être dure d’oreille, cette vieille Marta, ou bien faisait semblant, car bizarrement elle n’entendait plus que ce qu’elle voulait. Le téléphone qui sonnait ? Oh, elle était occupée à bichonner son potager. Sylvi qui demandait à changer de chaîne télé ? Cette émission était décidément très captivante. Pour échanger les potins du jour avec les voisines, par contre, elle ne manquait jamais à l’appel. C’était d’ailleurs elle qui avait lancé la rumeur selon laquelle Robin se serait mise fréquenter un policier : absurde, bien sûr, puisque tous les flics de Geiranger avaient dépassé la barre des 50 balais. Elle avait aussi provoqué un divorce, deux déménagements, quelques bagarres et beaucoup de tensions inutiles, de quoi pourrir les quelques relations amicales qu’il restait à Robin. Celle-ci l’aurait probablement virée si elle ne s’occupait pas si bien de Sylvi, rendant toute la situation ma-mère-est-un-légume-en-fauteuil-roulant cent fois moins pénible. Et puis, Marta était comme une deuxième mère, une tante proche ou une nounou. Chiante, mais tout le monde s’y était fait. C’était elle qui avait gardé Robin quand Sylvi travaillait trop, elle qui avait accueilli Aron quand ses parents l’avaient foutu dehors, à dix-sept ans, quand ils avaient appris qu’il avait mis la petite Anita en cloque. Bref, Marta était le pilier de cette famille recomposée. Personne ne virait Marta. Personne ne contrariait Marta, même quand elle sous-entendait sans grand tact que vous alliez droit dans le mur, que votre job était pourri, qu’elle ne vous avait pas payé des études pour que vous changiez complètement de branche ensuite. « Et ton diplôme d’infirmière ? Il y a un bon hôpital, ici… » « Et il n’y a que des vieux à accompagner aux toilettes, trois fois par jour ? Non merci. » Son diplôme d’infirmière, c’était juste pour aider sa mère. Marta était loin d’être une auxiliaire de vie, elle était fille unique, personne n’avait envie de l’envoyer dans une de ses maisons de retraites déprimantes d’Ålesund… les solutions ne se bousculaient pas. Guide touristique pendant l’été était beaucoup plus amusant qu’elle aurait pu l’imaginer, malgré tous ces étrangers qui ne comprenaient rien au norvégien, ni à l’anglais, et bosser au commissariat le reste de l’année était… disons que ça faisait l’affaire. Tant qu’Aron restait dans les parages, tout était sous contrôle.

***

« Tu vas partir, alors ? » Ils étaient assis sur les briques inconfortables du toit, béats devant la vue que leur offrait le fjord de Geiranger. Ou peut-être était-ce simplement l’effet du pétard. « Oui, et inutile de le dire, je sais que je vais te manquer. » Aron lui envoya un coup de coude dans les côtes avant d’expirer un cercle parfait de fumée. Qu’est-ce qu’il allait faire, lui, pendant qu’elle partait faire ses études à Ålesund ? Il savait que son absence allait lui faire un truc, un creux, un vide peut-être, mais il n’avait pas envie d’y penser maintenant. Vraiment pas envie. « Peter-Texas-Ranger m’a encore parlé de toi aujourd’hui. » Il ricana pendant qu’elle levait les yeux au ciel. « De tes cheveux, précisément. Quelque chose comme… attends… "sa blondeur me rappelle les champs de maïs du Texas"… » Ils se mirent à pouffer de rire, imaginant tout à fait Peter mâchouillant une brindille, le chapeau de cow-boy vissé sur le crâne. « Lui, il ne va pas me manquer ! » « Mais moi, si. » Sourires complices. Aron avait toujours tendance à virer dans le mélodramatique, pour ce genre de scène. Ils les appelaient Les Grandes Etapes de la Vie. La première cuite. La fin du lycée. L’avortement d’Anita, sûrement. Robin prenait toujours un malin plaisir à les écraser dans l’œuf. « Tu savais qu’Anita m’avait déconseillé de traîner avec toi ? » Elle sourit dans la nuit, lui arracha le cône des doigts. « Elle t’avait déconseillé de rester avec Marta, oui. T’avais pas le choix, j’étais vendue avec. » « T’imagines, si Marta m’avait pas… ? » « Tu vas me manquer aussi, Aron, c’est bon, t’es content là ? » Il haussa les épaules, dissimulant son sourire derrière une autre bouffée. « Ouais, c’est bon, je suis content. »